Une autre histoire, sur la piste des Dieux

"La puissance merveilleuse du soleil provient, selon Dorn, de ce qu'il "contient en lui tous les éléments simples, à l'égal du ciel et des corps célestes". "Unum dicimus elementum esse solem : nous disons que le soleil est l'élément unique" déclare notre auteur, qui identifie donc tacitement le soleil avec la quintessence. Un remarquable passage du Consilium Conjugii éclaire cette conception : "Ils (les philosophes) disent que le père de l'or et de l'argent est l'être vivant de la terre et de la mer (animal terrae et maris) ou l'homme, c'est à dire une partie de l'homme tell que les cheveux, le sang, les menstrues, etc..." L'idée sous-jacente à cette manière de voir est évidemment la conception primitive d'une puissance partout répandue d'enchantement, de magie, de santé, de croissance qui se rencontre dans le soleil aussi bien que dans l'homme et dans les plantes. Par suite, non seulement le soleil mais aussi l'homme, et en premier lieu l'homme illuminé, l'adepte, peuvent engendrer l'or grâce à cette vertu universelle. Dorn (et avec lui beaucoup d'autres encore) savait pertinemment que la fabrication de l'or ne pouvait réussir selon les voies chimiques, c'est à dire vulgaires. Il donne pour cette raison à la chrysopée le nom de miraculum. La merveille est réalisée grâce à une "nature cachée" (natura abscondita), une réalité métaphysique "qui n'est pas perçue par les yeux extérieurs, mais seulement par l'intelligence (mente sola)". Elle est "infusée du haut du ciel" (coelitus infusa), moyennant que l'adepte s'approche aussi près que possible des choses divines et qu'il ait en même temps extrait des matières les vertus très subtiles propres à l'action merveilleuse (ad actum miraculosum idoneae)."

Carl Jung, Mysterium conjunctionis